Nuala Barlow - d'un pas prudent...

Visiteuse Nombre de messages : 68 Date d'inscription : 14/02/2006

Nuala sentit le pont gémir sous son poids, comme s'il protestait de l'intrusion de cete inconnue. Les ténèbres qui y régnaient n'étaient guère accueillantes, et la jeune femme dû prendre sur elle pour continuer à avancer.

La pénombre qui l'enveloppait était si dense qu'elle lui semblait peser sur ses épaules, comme un manteau trop lourd. A quelques pas d'elle, un petit carré de lumière blanche se découpait sur le plancher poussiéreux provenant d'une petite ouverture latérale. Nuala s'en approcha vivement, prise du besoin irrépréssible de revoir la lumière. La lune brillait dans le ciel, éclairant faiblement la campagne alentour. La jeune femme passa la tête par la fenêtre et se pencha. Au-dessous d'elle coulait une onde paresseuse. La surface en était lisse, à peine ridée par quelques insectes et la brise légère qui soufflait.

Nuala tourna la tête pour apercevoir le manoir mais l'ouverture était trop étroite, elle ne pouvait s'avancer plus. Elle ne voyait pas la bâtisse. Devait-elle vraiment continuer ?

La légère brise cependant forcit brusquement.
Les rameaux pendants des saules tous proches s'agitaient à present sous le souffle plus puissant qui les échevelait.
Le tendre ruissèlement de l'eau sur les pierres de la rivière gonfla sans avertissement et se fit plus violent. Arrachée à la rive en amont une large branche morte vint frapper l'une des piles du pont.
La structure entière eut un frémissement et parut soudain bien moins fiable qu'on ne l'eut cru de prime abord.
Plusieurs craquement de mauvais augure se firent entendre et une fine poussière de pourriture chut du plafond de l'abri, venant maculer les mains de la jeune femme et les manches de son habit.

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Surprise par la soudaineté de la bourrasque de vent, Nuala recula. Le pont avait des grincements inquiètants, Nuala le sentait tanguer sous ses pieds, mais elle n'aurait su dire si c'était sa peur qui exacerbait ses sensations. La pluie de sciure qui maculait ses vêtements lui fit craindre le pire : le pont était-il en train de se disloquer ?!

Elle préférait autant ne pas s'attarder à vérifier l'état du pont. Les éléments semblaient s'opposer à son avancée, mais la jeune femme continua d'un pas précipité. Elle redoutait pourtant que son pied traverse la plancher à chaque enjambée. Elle apercevait vaguement une lumière grise devant elle, qui devait certainement correspondre à la sortie.

La structure en effet vacillait sous le pas vif de la jeune femme.
Sans doute son poids, bien que léger, avait fini d'en fragiliser le bois et lorsqu'une branche, projetée plus violemment que la précédente, vint en frapper la pile de toute la force du courant qui l'emportait, la resistance du pont céda brutalement dans un craquement d'apocalypse.
Aussitôt la construction prit une inclinaison fort dangereuse pour l'equilibre de Nuala et la partie du pont qu'elle venait de franchir s'effrondra dans l'eau vive.
Il ne faisait aucun doute que le reste de la stucture ne tiendrait plus longtemps et que bientôt tout s'effondrerait, emportant la malheureuse jeune femme dans le courant.

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Le plancher du pont qui tanguait sous ses pieds avait déjà commencé à affoler Nuala. Mais l'épouvantable craquement qui retentit dans son dos acheva de la paniquer totalement. Elle se sentit aspirée vers l'arrière par un violent souffle d'air.

Son esprit se vida de toute pensée. Dans certaines situations, mieux valait ne pas trop réfléchir...et dans ce cas-ci tout particulièrement ! La jeune femme se propulsa en avant, prenant ses jambes à son cou. Fort heureusement, la sortie était toute proche, et Nuala n'eut qu'à parcourir quelques mètres. Arrivée sur la terre ferme, elle fit quelques pas en titubant., puis se retourna pour voir ce qu'il advenait du pont.

Cependant, une brume s'était levée, fort courante en cette saison dans la région.
Le pont ne semblait pas visible depuis la rive où se tenait la jeune femme, seul le reflet mouvant de la lune sur l'eau était perceptible.
Une ombre plus sombre pourtant, qu'elle pouvait distinguer à condition d'etre tres attentive, attestait de la présence de la construction.
Mais il aurait été fort surprenant qu'elle puisse dire avec certitude si le pont se tenait bien où elle le croyait ou s'il ne s'agissait que d'un souvenir dressé là par le jeu de son imagination.

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Gênée par la brume qui venait de se lever, Nuala ne parvint pas à distinguer la construction. Elle s'avança de deux pas, mais préféra ne pas en tenter un troisième. La terre de la rive était friable, elle ne tenait pas à se précipiter dans l'onde comme une idiote, alors qu'elle venait juste d'y échapper ! Enfin...il lui semblait. A présent, elle voyait l'ombre du pont couvert, mais la vue n'était pas assez dégagée pour lui permettre d'en faire l'état. Rien ne bougeait. Elle n'entendait aucun craquement. Avait-elle rêvé sa mésaventure ? Son inquiètude avait-elle stimulé son imagination ?

Pourtant, la sciure sur son manteau était une preuve ! Triomphante, Nuala inspecta ses manches, à la recherche de la fine poussière qui la maculait. Sa bouche se tordit en une grimace de dépit. Sa première réaction après avoir atteint la berge n'aurait pas dû être de s'épousseter. A présent, elle n'était plus sûre de rien...

*Avec aussi peu de lumière, il est normal que je ne voie rien ! Ce pont a commencé à s'effondrer, j'en suis certaine...*

Mais l'heure n'était plus aux suppositions. Elle devait continuer, découvrir une âme vivante dans ce vieux manoir - charitable de préférence. De toute manière, faire demi-tour était hors de question, elle refusait de s'engager à nouveau sur ce pont de malheur ! Tournant les talons, le coeur battant, l'esprit aussi brumeux que la nature environnante, elle s'éloigna en direction de la bâtisse.

[Les communs]

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